Les Impunis, Olivier Weber, Robert laffont, 245 pages.
Coup de projecteur sur l’essai
d’Olivier Weber, Les Impunis, paru
chez Robert Laffont. Grand reporter, correspondant de guerre et voyageur
impénitent, Olivier Weber est l’auteur d’une vingtaine de livres dont Le Faucon afghan, Le Grand Festin de l’Orient et La
Mort blanche. Il nous revient avec un saisissant récit sur le Cambodge, et
plus particulièrement sur l’enclave de Pailin où vivent, en toute impunité, un
grand nombre d’anciens tortionnaires Khmers rouges qui n’ont jamais été jugés
et qui côtoient quotidiennement leurs anciennes victimes. Pailin est un état de
non-droit mafieux où le silence et les exactions - blanchiment d’argent,
prostitution, règlements de compte - sont érigés en valeur suprême. Or ce
silence a des conséquences dramatiques : « Les survivants des
génocides sont deux fois victimes, des génocidaires et d’eux-mêmes ». La
population a en effet tendance à fermer les yeux et à qualifier les massacres
de « petites erreurs du passé », tous s’efforcent d’oublier, parce
que le souvenir est douloureux mais aussi parce qu’ils ont peur : les
exécutants courent toujours et effraient encore. Les bourreaux eux ne craignent
rien : « Ils ont l’argent, les armes et la douleur du peuple, la
culpabilité de tous (…) car nous ne savons plus qui est qui, tout le monde
s’est mélangé, coupables et innocents, tant et si bien que les innocents se
sentent coupables et que les coupables se sentent innocents ». À force
d’être accepté, le mal finit par se banaliser…