13 janv. 2011

Valeur littéraire ajoutée

Dans la mer il y a des crocodiles, l'histoire vraie d'Enaiatollah Akbari, Fabio Geda, Liana Levi
Les histoires vraies, souvent appelées « récits de vie », qui pullulent dans les librairies m’ont toujours fait grincer des dents. On tombe le plus souvent sur des témoignages mal écrits et dégoulinant de pathos, une prose de magazine people qui suinte le pseudo-romantisme guimauve ou un trash gore.

Rien de tel ici. Et pour cause, ce n’est pas le protagoniste de l’histoire qui a écrit le texte mais un vrai romancier, Fabio Geda qui met tout son talent d'écrivain au service de cette histoire bouleversante qui touche de plein fouet le très actuel problème de l’émigration et des clandestins.

Un parcours de vie difficile raconté sans misérabilisme. Ou comment abandonné à l’âge de dix ans par sa mère à la frontière pakistanaise, un jeune Afghan Hazara (de confession chiite) menacé par les Talibans et les Pachtounes de son pays se retrouve sans ressources et sans personne pour l’aider. Il décide de quitter le Pakistan pour l’Europe dans l’espoir d’une vie meilleure. Une trajectoire peu commune pour un aussi jeune garçon. Il lui faudra cinq ans pour traverser le Pakistan, l’Iran, la Turquie, la Grèce et rallier enfin l’Italie. Cinq ans de privations, de peur, de travaux dégradants et de contacts effrayants avec les trafiquants d’hommes et les passeurs. Il survivra à des situations abominables : le passage de la mer Egée en canot pneumatique, deux journées passées agenouillé entre les essieux d’un camion et un mois de marche dans les montagnes turques.

Si le parcours d’Enaiat est exemplaire à bien des égards, le style de Geda est poétique et drôle. Vous l’aurez compris, c’est un livre sans fausse note qui vous prend par les tripes tant l’émotion est présente à chaque page. Et puis en le refermant vous aurez certainement une vision différente de ces affamés, ces apeurés, ces gens qui ont bravé des dangers inimaginables pour trouver un bout de terre où vivre tranquillement. Etre loin de ses racines n’est facile pour personne. Lorsqu’on quitte sa terre natale, on ne peut souvent pas faire autrement. C’est à Turin que vit Enaiatollah Akbari âgé maintenant d’une vingtaine d’années. Je lui souhaite de tout cœur d’avoir trouvé l’endroit où il pourra enfin vivre en paix.

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