La Grammaire de Dieu: histoires de solitude et d'allégresse, Stefano Benni, traduit de l’italien, Actes Sud, 259 pp.
14 avr. 2009
Allegro et sotto voce
La Grammaire de Dieu: histoires de solitude et d'allégresse, Stefano Benni, traduit de l’italien, Actes Sud, 259 pp.
Je grammaire, tu grammaires, nous grammairons
Qui l’eût cru, on peut s’amuser en lisant un précis de grammaire ! C’est le pari (réussi !) auquel se sont attelés les Français Olivier Houdart et Sylvie Prioul. Les deux compères nous entraînent avec enthousiasme et drôlerie sur les pentes escarpées de quelques grandes règles grammaticales dont ils explorent les zones d’ombre, parvenant à rendre le fastidieux accord du participe passé des verbes pronominaux aussi ludique qu’agréable. Ils démystifient et donnent quelques trucs et astuces très utiles pour ne plus achopper sur les écueils habituels. Une bouffée d’air frais pour dépoussiérer l’imbroglio grammatical et comprendre l’origine historique de toutes ces règles. Les auteurs ont aussi la jolie idée d’assortir leur ouvrage d’exemples nombreux et éclairants, sortis pour la plupart du monde de la presse. Ils n’hésitent pas non plus à se frotter à la délicate féminisation des noms de métiers, qui a elle seule a déjà fait couler beaucoup d’encre. « Chapeau Messieurs les auteurs ! ». Et oui, l’accord se fait avec le genre masculin : Monsieur Houdart, vous l’emportez !
La Grammaire, c’est pas de la tarte !, Olivier Houdart et Sylvie Prioul, Seuil (Article paru dans le Vif/l'Express du 10 avril 2009)
8 avr. 2009
Intimité et intelligence
Il est difficile de résumer en quelques phrases les 21 récits du livre de Daniel Karlin tant le propos est dense et varié. Réalisateur pendant plus de trente ans d’émissions sur la folie, l’hôpital, l’inceste, l’autisme ou la prison dont les fameux La raison du plus fou (1970), Justice en France (1991), Des enfants abusés (2000) et le controversé Et si on parlait d’amour (2002) - qui l’a d’ailleurs décidé à arrêter la réalisation audiovisuelle -, Daniel Karlin revient sur son parcours de documentariste et sur les rencontres qui l’ont émaillé. Il s’attache à des figures aussi diverses que celle de Broussilovski, un ancien camarade du PCF dont il décrit l’itinéraire. Il revient sur l’affaire Jean Michel Di Falco, évêque auxiliaire de Paris accusé en 2002 de pédophilie, dont il dénonce entre autres l’ignominieuse mauvaise foi. Communiste convaincu, Daniel Karlin retrace avec amertume un voyage au Vietnam en 1979. Il reconnaît la faillite de la politique des dirigeants communistes vietnamiens et l’oppression policière qui règne à l’époque dans la ville d’Hô Chi Minh.
À côté de la grande histoire, Daniel Karlin dresse aussi des portraits intimistes comme celui d’un jeune ami myopathe qui, après avoir cruellement échoué à s’imposer comme psychothérapeute, mourra trois mois plus tard. Dans Le ballon vert, nouvelle éponyme qui ouvre le recueil, l’auteur épingle la rigidité de certaines institutions à travers le récit d’un jeune enfant sourd considéré comme « débile » par le centre où il s’étiole alors qu’il se révèlera finalement vif et curieux de tout. Dans une autre de ses nouvelles, Karlin s’intéresse au délicat sujet de l’inceste osant poser la question de l’absence intrinsèque du sentiment de culpabilité chez la majorité des abuseurs.
Les textes de Karlin sont marqués par une grande indépendance d’esprit et une sensibilité engagée. Grande gueule au cœur tendre, il remet quelques pendules à l’heure. Mais, au-delà de ses coups de pied dans la fourmilière, on le sent animé d’un profond besoin de traquer l’humain derrière les apparences, même chez le pire criminel. Beaucoup d’intimité et d’intelligence dans ce livre, à la fois essai sociologique et texte littéraire, estampillé par cette phrase : « Nous cherchions du sens partout où nos pas nous conduisaient. »
Le ballon vert et autres nouvelles d’un monde à l’envers, Daniel Karlin, Seuil, 240 p.
(Article paru dans le Vif/L'Epress du 3 avril 2009)
Instants de grâce...
Fascinant Mexique
Dictionnaire amoureux du Mexique, Jean-Claude Carrière, Plon, 507 p.